17/01/2013

Sans protéines, délicieux quand même



Après s'être imposés dès leur premier disque - et grâce à des singles imparables (This Charming Man, Hand In Glove, What Difference Does It Make?) - comme le groupe britannique ultime des années 80, The Smiths remet le couvert en 1985 pour un deuxième album - Meat Is Murder - plus vif et plus personnel encore avec, au menu, les idées singulières de Morrissey qui densifient encore un peu plus sa plume acerbe et acérée. 

Fin observateur de la vie quotidienne anglaise, et notamment des classes populaires qui grouillent à Manchester, sa ville natale, Morrissey commence ce deuxième disque par le sublime mais accablant The Headmaster Ritual, à propos de la violence enfantine. Tout l'album reste sur ce ton, un rythme globalement enlevé (avec quelques passages dans le rockabilly !) qui masque à peine des textes emprunts de désespoir, au lyrisme sinistre et à l'engagement intense. 

Si Johnny Marr, discret mais magnifique "guitar héraut", délaisse quelque peu ses arpèges qui avaient fait tout le charme du premier opus du groupe, c'est pour mieux accompagner Morrissey et ses thèmes de prédilection posées sur des mélodies plus percutantes. Ce dernier s'en sort divinement bien et, lorsque ses cordes vocales s'autorisent un aller-retour dans les aigus, c'est tout notre corps qui réagit, les poils se levant les uns après les autres.

Car Morrissey est bien le point central de cet album. Sa personnalité transpire du début à la fin de chaque morceau : de son éternel désespoir amoureux (I Want The One I Can't Have) à sa ville de Manchester (Rusholme Ruffians) en passant par son combat pour l'alimentation végétarienne avec le morceau-titre Meat Is Murder. Dernière piste, le morceau clôture avec audace un album qui n'en manque pas : les larsens de guitares accompagnent les beuglements d'animaux se perdant dans le vide... et pendant 4 minutes, on l'admet, hors de question de manger de la viande, pris dans ces sons qui nous menacent et grincent comme les lames entourant le bétail envoyé à l'abattoir.

"A crack on the head 
Is what you get for not asking
And a crack on the head 
Is what you get for asking"

Barbarism Begins At Home brille quand à lui par la violence de ses deux couplets qui dénoncent les violences que subissent les enfants livrés aux parents alcooliques, de légion dans les alentours d'une industrielle Manchester livrée à elle-même dans les tourments de l'Angleterre de Mrs. Tatcher. Encore une fois le contraste est flagrant entre des textes terribles et une musique inhabituellement funky pour le groupe avec ce riff génial signé Marr.


Génial mais particulier, voilà comment caractériser ce disque engagé et engageant pour tous ceux qui sauront y trouver la poésie qui règne entre des lignes toutes plus violentes les unes que les autres : "What she said : I smoke coz' I'm hoping for an early death". Ravageur.

S.

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